Frank William Batchou

Cameroun : retour des Lions en pièces détachées

Après leur Mondial totalement raté, les Lions indomptables ont quitté le Brésil. Si certains ont décidé d’éviter le pays en retournant directement en Europe, d’autres sont passés par la case Cameroun. Un retour en ordre dispersé qui prouve l’explosition d’un groupe. (Crédit photo : mustapha_ennaimi, Flickr/CC)

Ce n’est pas la première équipe dans laquelle on enregistre un tel malaise humain et tactique. Nous en sommes conscients. Ce à quoi on ne s’attendait pas, malgré la colère des camerounais, c’est ce retour en pièce détachée. Pour une équipe supposée « Une » au départ. N’est ce pas le même avion qu’ils avaient tous pris au départ de Yaoundé ?

Pas de foule pour « les héros« 

C’est donc un spectacle ahurissant qui s’est vu à l’aéroport international de Yaoundé Nsimalen. Primo, pas de foule pour accueillir les « héros brésiliens ». Pourtant, des centaines d’hommes, vêtus aux couleurs du grand sponsor, avaient avalé des dizaines de kilomètre à pied pour aller dire au revoir aux fauves.

Secundo, le site aéroportuaire était quadrillé par des hommes en tenue militaire. Question d’assurer la sécurité de la huitaine de joueurs retournée au Cameroun. Ceux-ci sont très vite engouffrés dans une voiture pour être conduit dans leur hôtel sous escorte. Hum !!! Le pays, hey ! Les autres coéquipiers ont pris la direction de l’Europe pour, disent-ils, rejoindre leur famille ou leur club.

En tant qu’ambassadeur de toute une nation, je pense qu’en tant que patriote, vous deviez d’abord retourner à Yaoundé au Cameroun, lieu de départ pour la coupe du monde, avant de se séparer. Mais hélas !

Haie d’honneur pour Volker Finke

Avant le Mondial, le geste avait été immédiatement critiqué : celui de remettre à Volker Finke, l’entraîneur national des Lions indomptables du Cameroun, le drapeau camerounais au stade omnisport Ahmadou Ahidjo.

Le « sorcier blanc » devenait ainsi le porte-étendard de cette nation. Incroyable… et pourtant vrai ! Après la débâcle des Lions indomptables, l’homme à pris la clé des champs. Emportant avec lui, le drapeau tricolore camerounais que lui avait remis le Premier ministre, Philémon Yang.

Mais l’homme pouvait-il vraiment revenir au Cameroun ? Pour ceux qui dorment toujours, Volker Finke vous a dit au revoir avant de partir. Oui, je suis sérieux. Les affiches sont bien visibles. Ses poulains lui avaient d’ailleurs fait une haie d’honneur sur la publicité d’un sponsor…

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Les bras levés vers le ciel, il a marmotté : « Adieu cher(e)s camerounais(es). Ce fut un plaisir »…

Ahahahahhaha ! Ce n’est pas le premier à poser ce genre d’acte. Paul Le Guen, ex coach des Lions indomptables lors du mondial 2010 en Afrique du sud, avait fait pareil. Après l’élimination du Cameroun au premier tour (0 points, 9 buts encaissés et 2 buts marqués), l’homme avait pris la direction de la France. Sans signaler courageusement sa démission comme Sabri Lamouchi de la Côte-d’Ivoire ou Cesare Prandelli de l’Italie.

Les Camerounais doivent accepter la défaite

 

De toute façon, je vous comprends les gars. En faisant escale au Cameroun, vous auriez été certainement molesté comme Stéphane Mbia Etoundi qui a pourtant donné le meilleur de lui au Brésil.

Sérieux, les Camerounais devraient apprendre à accepter la défaite, pareil comme la victoire, et arrêter ce genre de barbarie commis sur Stéphane Mbia, le 25 juin 2014 à l’Avenue Kennedy à Yaoundé.

Frank William BATCHOU, Observateur de France 24


CAMEROUN : « Les Lions Indomptables ont re-tué Marc Vivien Foé »

COUP DE GUEULE | Avant le début du Mondial, j’avais fait le rêve que les Lions indomptables respectent la mémoire d’un grand joueur, Marc-Vivien Foé, et nous fassent vibrer comme à son époque. Mais plutôt que d’avoir ravivé sa mémoire, l’équipe de cette année l’a re-tué. ( Crédit photo : Egghead06, Wikimedia Magnus Manske).

Tout mon espoir reposait sur toi. Fameuse compétition. Et je vais vous dire pourquoi. Primo, elle tombait bien. Au mois de juin. Un mois souvent emprunt de tristesse pour nombre de Camerounais. Car, comme moi, ils se souviennent encore de l’écroulement dans le rond central du stade de Gerland à Lyon en France, du grand Lion Marc Vivien Foé. C’était le 26 juin 2003 lors du match Cameroun – Colombie (1-0) comptant pour les demi-finales de la Coupe des confédérations.

11 ans plus-tard, « la terre du football » accueille la Coupe du monde de football. Une belle occasion pour les Lions Indomptables de rendre un vibrant hommage à ce passionné et amoureux inconditionnel du football qu’était Marc Vivien Foé. Ceci à travers un « football champagne », comme on dit au bled. Avec à la clé, de bons résultats.

J’avais fait un rêve…

En fait, c’est le rêve, comme celui de Martin Luther King Jr, que j’avais fait au lendemain du match amical Cameroun – Allemagne (2-2). Mais hélas ! C’était sans compter sur le manque d’engagement des « millionnaires du football » qui ont d’abord refusé de prendre le drapeau national entre les mains du Premier ministre au stade Ahmadou Ahidjo.

Les supporters camerounais dans la ville
Les supporters camerounais dans la ville

Jusque là, le supporter que je suis avait encore l’espoir. Même après la défaite (1-0) face au Mexique. Ne vous avais-je pas dit qu’un lion reste un lion ? Devant la Croatie (4-0), j’ai compris qu’un lion peut, à un certain moment, devenir un chat. Malgré ma fougue, je me suis vu asphyxié par le poids des buts encaissés. Des bagarres entre joueurs d’une même équipe et la création d’une nouvelle danse (avec le coude) appelée la « Song’or ». Une nouvelle danse parce qu’on n’aime pas le copié/collé chez nous. Sinon, ça devait être un coup de tête comme celui de Zinedine Zidane à Materazi lors de la finale de la coupe du monde 2006.

Est-ce devant le pays organisateur que les Lions Indomptables vont faire quelque chose ? Pas plus. Car,  porté par tout un pays, on a assisté à une journée porte ouverte (de buts) dans les goals camerounais. Au lieu d’honorer valablement la mémoire de Marc Vivien Foé, vous avez davantage contribué, chers Lions indomptables, à son assassinat et son oubli en ce mois de souvenir. Oui. Vous avez re-tué Marc Vivien Foé. C’est pourquoi, des supporters, en maillots, se baladent la tête baissée dans les rues de Douala. Est-ce que c’est facile alors ?

Si j’étais président de la République…

1-      Comme mon homologue, le feu général Gué, je conduis toute la délégation, sans exception dans un camp militaire. Pour avoir souillé avec honneur le drapeau tricolore, chaque membre chantera l’hymne national, en marquant les pas sur place et en recevant quelques coups de bâtons aux fesses. Ainsi, la fibre patriotique naîtra dans la conscience de tous. Et avant de porter dorénavant ce maillot, chacun comprendra qu’il est différent de celui d’un club.

2-      Comme en France, je vous ferai rembourser, jusqu’au centime près, la prime de 56 millions de Fcfa (environ 85496 euros) revendiquée par chacun de vous. Car, c’est l’argent du contribuable qui a été mis à votre disposition. Afin que vous alliez salir l’image de tout un pays.

3-      Comme au Nigéria, il y a quelques années, je sevrais cette équipe nationale de football de toute compétition internationale pendant au moins cinq ans. C’est vrai que la Fifa interdit l’ingérence du politique dans les affaires de football. Mais, il le faut. Cela permettra de soigner cette tumeur qui tue à petit feu le football camerounais.

Aieeee !!! Voila, c’est encore un rêve. Comme celui évoqué au départ. Fin du game !

Frank William BATCHOU, Observateur de France 24 à Douala, Cameroun


Cameroun : Douala tarde à enfiler son maillot de supporter

2- Vendeur des gadgets aux couleurs nationales

Douala, ville cosmopolite, va vivre demain  l’ultime rencontre amicale des Lions indomptables du Cameroun. La Coupe du monde est dans six jours. Et pourtant, on ne sent pas d’engouement.

Vendredi 6 juin 2014. Le temps est clément après une nuit pluvieuse. Les habitants de la ville de Douala vaquent à leur occupation quotidienne. Dans les rues, l’ambiance est identique à celle des jours ordinaires. Aucun élément annonciateur du match Cameroun – Moldavie. Les banderoles du sponsor majeur annoncent encore les précédentes rencontres amicales (contre la Macédoine, le Paraguay et l’Allemagne).

C’est pourtant le dernier match amical des Lions indomptables avant le Mondial au Brésil. Cette rencontre, au stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé, est aussi une façon de dire au revoir et recevoir l’onction du peuple camerounais tout entier. Les habitants semblent ne pas être au courant de ce match.

« Ce sont les banderoles que vous voyez là qui nous annoncent les matches des Lions. Si même le sponsor officiel n’en parle pas, cela signifie que ce n’est pas important. Impossible donc d’être au courant de ce match » m’explique un commerçant au lieu dit « Feu rouge » Bessengue.

1- Banderole

Dans les embouteillages, des jeunes proposent des gadgets aux couleurs nationales et aux couleurs des autres équipes : chapeaux, bracelets et drapeaux. Les prix varient entre 200 Fcfa (environ 0,30 euro) et 1000 Fcfa (environ 1,53 euro). Mais, les acheteurs se font rares.

« Ils disent qu’ils n’y a pas encore d’argent. On ne vend pas beaucoup. Ma recette par jour est parfois 2000 Fcfa (environ 3,1 euros), parfois 2500 Fcfa (environ 3,8 euros). On espère qu’on vendra plus pendant la Coupe du monde »,

explique Junior, jeune commerçant. Jean Francis Onguene, un client, me rappelle que « les Camerounais ne sont jamais pressés. Ils attendent toujours la dernière minutes pour se bousculer afin d’acheter un gadget de supporter. Même autour de moi, dans mon quartier, les gens disent attendre le 12 juin (jour du match d’ouverture). Faute d’argent actuellement, je prends uniquement deux drapeaux et des bracelets pour mes enfants ».

3- Les drapeaux des différents protagonistes

Par endroit, quelques rares drapeaux flottent au vent. Des signes qui prouvent que les supporters des Lions indomptables trainent encore le pas dans la ville de Douala. Contrairement aux années antérieures où les rues rayonnaient aux couleurs tricolores.

Cette effervescence matinale autour du football a un impact sur le chiffre d’affaire des vendeurs de maillots. Fabrice en est un. Installé au lieu dit « Equipement » à Akwa depuis quelques années, il attend impatiemment la venue d’un potentiel acheteur, le premier de la journée. Assis sur son tabouret, à cette heure avancée de la journée (12h), il nous répond avec un air fugace :

« On a du mal à vendre les maillots. On a comme l’impression que les camerounais ne s’intéressent plus au football. Pourtant dans les années antérieures, à moins d’une semaine comme maintenant, les gens se bousculaient. On attend toujours les clients ».

4- Des minables signes par endroit

Vivement le réveil rapide des supporters des fauves d’Afrique centrale, quadruple champions d’Afrique. Afin de porter haut cette équipe jusqu’au sacre final.

Frank William BATCHOU, Observateur de France 24 à Douala


Cameroun : « Jean-Armel Kana Biyik, un lion doit rester un lion ! »

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Le défenseur central du stade Rennais et des Lions indomptables, Jean-Armel Kana Biyik, ne sera pas à la Coupe du Monde / Photo page Facebook du Stade Rennais.

Pour sa non-sélection dans la liste des 23 Lions Indomptables retenus pour défendre le pays au mondial, le défenseur du stade Rennais dit mettre un terme à sa carrière internationale. Une scène à la Lauren Etame Mayer et Eto’o Fils. Qui provoque un coup de gueule de notre blogueur à Douala, Frank William Batchou.

La retraite internationale. Une expression qui sonne mal dans la tête de nombreux footballeurs. Ceux-ci veulent porter éternellement le maillot national afin de défendre, avec loyauté, la patrie.

Néanmoins, la retraite est inévitable. Si blessure, mort (comme Marc Vivien Foe du Cameroun) ou un problème cardiaque (Khalilou Fadiga du Sénégal dont les tests médicaux ont révélé en 2003 « une arythmie cardiaque importante qui n’est absolument pas compatible avec la pratique de la compétition ») ne surgit pas, La retraite internationale arrive à la suite d’une longue carrière bien méritée. Un grand jubilé faisant parfois foi à la déclaration.

On peut citer, en restant seulement au Cameroun, des exemples tels que Roger Milla, Patrick Mboma, Omam et Kana Biyick, Geremi Sorel Njitap, Thomas Nkono… Depuis hier, 4 juin 2014, la donne semble avoir changé. En effet, le défenseur du Stade Rennais en Ligue 1 française fait du buzz ici au Cameroun. Jean Armel Kana Biyick (il aura 25 ans le 3 juillet prochain) annonce sa retraite internationale. La cause à « plein de magouilles en équipe du Cameroun » ainsi que sa non-sélection par Volker Finke pour le mondial 2014 au Brésil.

Une décision prise à la hâte ?

Paraît-il que non, pour lui. Car, répondant aux questions de Jérémy Goujonhit, il affirme que :

« Si je ne l’avais pas dit aujourd’hui, je l’aurais dit dans un mois ou deux. Ils ne peuvent plus compter sur moi. C’est fini. Qu’ils ne m’appellent plus. Je ne suis plus à leur disposition ».

Pour moi, c’est une décision très brusque, qu’il prend beaucoup trop tôt. A seulement 24 ans. De plus, le joueur n’a même pas servi cette équipe nationale pendant deux années. Contrairement à son père  André Kana Biyik. Cela signifie qu’il n’y a pas encore fait ses preuves comme Lauren Etame Mayer et Samuel Eto’o Fils, deux autres joueurs qui avaient quitté la sélection.

Le premier avait claqué la porte de l’équipe nationale au lendemain de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2000 remportée par le Cameroun face au Nigéria. C’était aux tirs au but à Lagos. En dépit des nombreuses tractations entreprises par les émissaires de la Fédération Camerounaise de Football (Fécafoot), Etame Mayer est resté campé sur sa décision.

Le second, capitaine des Lions indomptables, avait, au terme d’un match perdu à Yaoundé, opté pour une retraite internationale anticipée. Il a fallu l’intervention des pouvoirs publics avec à la clé, une audience de Ferdinand Ngoh Ngoh, le secrétaire général de la Présidence de la République du Cameroun, pour pousser Samuel Eto’o Fils à revenir sur sa décision.

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Deux exemples battants que Jean Armel Kana Biyik veut copier. Réussira-t-il à se faire prier par les pouvoirs publics, les membres de la Fécafoot et les futurs encadreurs de l’équipe nationale pour réenfiler le maillot tricolore ? Une affirmation ou une infirmation sera difficile à faire maintenant.

Ce qu’il oublie, c’est que Samuel Eto’o et Lauren Etame Mayer dont-il veut suivre les traces ont aussi essuyé des frustrations à leur arrivée dans la tanière. Rien n’étant facile dans la vie. Mais avec un cœur de lion, ils ont réussir à tenir longtemps. Avec à la clé, des succès engrangés.

Armel Kana Biyick, un lion reste un lion même s’il reçoit des coups. Donc, fuir la tanière aussitôt venu fait flipper. Partir parce qu’absent d’une liste des sélectionnés rabaisse le talentueux footballeur que tu es. Eric Cantona, n’a-t-il pas été refusé en 98 par Aimé Jacquet ? Nasri n’a-t-il pas été mis à l’écart cette année par Didier Deschamps ? Achille Emana et Sébastien Bassong, malgré leur saison époustouflante, n’ont même pas été présélectionnés avant d’être recalé comme toi Armel Kana Biyik. Pourtant, ils sont toujours prêts à accepter d’arborer le maillot national.

Jean Armel Kana Biyick, cher compatriote, se faire prier est bien. Mais faut savoir quand et comment le faire. Brésil 2014 n’est pas le dernier mondial qui sera organisé sous la direction de la Fifa. Il y a 2018 et 2022 qui arrivent. Tu es jeune et plein de talent. Il n’est donc pas tard de se ressaisir et revenir sagement sur ta décision.

Frank William BATCHOU, à Douala