Népal : les différentes ambiances pour suivre le Mondial 2014
8 heures 45 séparent le Népal du Brésil. Une soirée du Mondial brésilien commence à 21h45 au Népal pour se terminer à 5h30 le lendemain matin. Les matchs sont diffusés à 21h45, 00h45 et 3h45. Les footeux népalais doivent donc être vaillants pour suivre cette Coupe du monde 2014.
Jeudi dernier, le match d’ouverture Brésil-Croatie a été diffusé à 1 heures 45 du matin au Népal. Il m’a fallu sillonner les rues de Lalitpur et de Katmandou pour enfin trouver un bar – l’Everest Irish Pub de Thamel – qui avait l’air ouvert : une grille laissait passer les lumières du vidéo-projecteur et les commentaires du match.
J’avais pourtant appelé et envoyé des mails à la plupart des bars pour m’assurer qu’ils diffuseraient bien les matchs. Tous m’avaient affirmé que oui. Pourtant le soir du premier match, ils étaient tous fermés. Les propriétaires avaient oublié de préciser qu’il fallait arriver avant 22 heures 30.
À Katmandou, les bars ferment généralement à 23h, minuit grand maximum – si l’on exclut les discothèques OMG et Fire Club. Alors, certains bars et restaurants (presque tous) ont fait un effort spécial pour la Coupe du monde. Ils restent ouverts jusqu’à la fin du troisième match de la soirée (qui commence à 3h45 du matin au Népal).
Plus d’entrée après 23 heures
Malgré ces écarts tolérés par les autorités népalaises, théoriquement les bars n’ont pas le droit de laisser entrer du public après 23 heures. Les fans de foot doivent donc arriver avant la fermeture officieuse, même s’ils veulent regarder le match de 3h45, le lendemain matin.
Pour voir le deuxième match de la soirée (qui commence à 00h45 au Népal), ça va encore. On regarde volontiers un Mexique-Cameroun en attendant l’alléchant Espagne -Pays-Bas. Mais il ne faut pas trop se laisser aller si votre équipe favorite marque des buts après minuit. Avant le début du deuxième match de la soirée, le gérant du bar passe de table en table pour glisser « ne criez pas trop fort s’il vous plaît ». Et oui, fermeture officielle à 23h. On n’a pas envie que les voisins appellent la police.
Si on veut regarder le dernier match de la soirée brésilienne (3h45 au Népal, donc) ça fait plus de quatre heures d’attentes. C’est énorme. Surtout si l’on doit se taper d’un ennuyeux Colombie-Grèce , suivi d’un Uruguay-Costa-Rica avant de déguster un Italie-Angleterre.
Des consignes respectées… au moins le premier jour
Voici une astuce pour profiter du dernier match dans l’ambiance d’un bar katmandais sans risquer de finir complètement saoûl à 5h30 du matin.
La première étape est de sympathiser avec un serveur de votre bar préféré – au hasard, je dirais le FC Sports Bar de Jhamsikhel où j’ai découvert le cricket. Chose très facile à Katmandou, car tous les barmen sont vraiment aimables (sans vouloir faire des généralités niaises). Moi j’ai fait la connaissance d’Amit[1], fan du Brésil. Demandez à ce barman s’il peut vous laisser entrer après 22h30. Prenez son numéro et prévenez-le quelques heures avant votre arrivée. Ça vous laisse le temps de faire une petite sieste entre le dîner et le match de 3h45.
Quand vous êtes devant le bar, il suffit de passer un coup de fil à Amit pour lui signaler votre arrivée. L’inconvénient, c’est que les serveurs aussi doivent se reposer entre les matchs quand les bars sont déserts. Il se peut donc que vous n’ayez aucune réponse. Surtout, n’hésitez pas à toquer deux gentils coups sur le portail. Un agent de sécurité viendra vous ouvrir avec indifférence comme si c’était normal d’entrer dans le bar à cette heure.
Vous vous installez sur un tabouret dans ce grand bar où seulement deux personnes sont assises en train de regarder le Chinatown de Polanski sur une petite télévision. Vous pensez alors être un privilégié : « J’ai trop de la chance qu’Amit ait prévenu de mon arrivée ». C’est seulement quand vous voyez une trentaine de personnes entrer dans le bar que vous comprenez que la consigne d’arriver avant 23h n’a tenu que pour la première soirée du Mondial. Amit viendra vous voir 5 minutes avant le début du match pour s’excuser« Désolé, je me reposais un peu, mais je suis content que tu aies pu rentrer ».
Du foot et du rock
Si ça ne se déroule pas aussi facilement, il reste toujours deux solutions à Thamel, le quartier qui se couche le plus tard à Katmandou (2h du matin, wow !). Il y a donc l’Everest Irish Pub, précédemment cité.
L’ambiance y est lugubre et, quand j’y suis allé, certains spectateurs lançaient des commentaires des plus douteux sur chaque pays participant à la Coupe du monde. Mais le serveur qui viendra vous ouvrir la grille (il faut aussi prendre son numéro) est vraiment sympathique.
Il y a aussi le Purple Haze Rock Bar. Ici, après l’heure légale de fermeture (minuit), il suffit de pousser la porte et de monter les marches pour suivre les deux derniers matchs de la soirée. Si vous aimez le rock, vous pouvez aussi regarder le match de 21h45 tout en vous défonçant les tympans avec les groupes népalais qui se déchainent à reprendre Rage Against The Machine, The Doors ou Nirvana sur la scène. J’ai une affection indescriptible pour ce lieu qui pue la bière, les spectateurs titubent au rythme de la musique et hurlent quand un but est marqué.
Pour des ambiances moins sophistiquées – quoique le Purple Haze nous accueille sans artifice – il y a enfin les salles de fête des quartiers de Katmandou. Je dois d’ailleurs répondre à l’invitation de Sandeep et Saugat qui suivent les matchs au Party Hall de Tinkune Koteshwor. J’y reviendrai plus tard.
« Drink ?«
Les arrangements particuliers pour les bars poussent la Traffic Police à prendre des dispositions particulières aussi. Dans un article du 10 juin, le quotidien Republica rapporte que les policiers ont prévu de travailler jusqu’à très tard [ENG] pour « promouvoir la conduite sécurisée ». Après le match d’ouverture, vers 3h45, j’ai même vu des éthylotests électroniques, alors que d’habitude, les policiers demandent simplement « Drink ? ».
Ces anges gardiens sont postés à tous les grands carrefours de la ville. Facile donc de les éviter. Mais le meilleur moyen pour éviter de prendre une amende reste la sobriété.
Une semaine avant le début de la Coupe du monde, j’avais senti peu d’enthousiasme chez certains Népalais. Pourtant le foot – surtout l’English Premier League – est un sujet de conversation récurrent ici. Ils disaient qu’ils sentaient moins l’ambiance footballistique, comparé à 2010. « Peut-être à cause de la grande différence de temps ? », avait suggéré Veenod. À ce moment, on ne savait pas encore où on pourrait regarder les matchs.
Une semaine après le début de la Coupe du monde, il suffit de compter le nombre de maillots floqués de Rooney, Neymar Jr. ou Messi pour sentir que Katmandou vibre bien pour ce Mondial 2014.
Stéphane HUËT, Mondoblogueur mauricien qui vit au Népal
[1] Amit est bien plus qu’un numéro de téléphone. Quand je viens au FC Sports Bar pour un match qui débute à 21h45, il me parle de ses prochaines études en Tourisme en Australie, de la tactique du Brésil et son souhait d’ouvrir une entreprise à Katmandou. On parle tellement que ces supérieurs doivent lui rappeler qu’il a des bières à servir.
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